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Publié le : 16 Décembre, 2022 - 11:00 Temps de Lecture 3 minute(s) 902 Vue(s) Commentaire(s)

Le témoignage glaçant de Slimane Bouhafs : ''On m'a pissé dessus et on m'a obligé à boire leurs urines...''

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Slimane Bouhafs, défenseur des droits humains est incarcéré depuis plus 16 mois. Lors de son procès qui s’est tenu hier jeudi, 15 décembre 2022, aux côtés de deux autres militants, en l’occurrence Kamira Naït Sid et Bouaziz Aït Chebib, le militant a livré un témoignage glaçant sur les conditions de son arrestation et de sa détention.

Kidnappé par des inconnus chez lui en Tunisie, le 25 août 2021, pour ses liens supposés avec Ferhat Mehenni et son mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK), Slimane Bouhafs, d’abord extradé vers l’Algérie, est conduit à la caserne Antar avant d’être placé sous mandat de dépôt jusqu’à son procès. Une extradition et une incarcération faites de tortures et d’humiliation dont il fait le récit lors de son procès, rapporté par le journaliste Zoheïr Aberkane.

« J’ai été kidnappé en Tunisie, par des personnes dont j’ignore l’identité, car on m’a bandé les yeux. Sur le chemin vers l’Algérie en passant par la forêt d’Al-Hamra, j’ai subi toutes sortes de tortures ; on m’a pissé dessus en cours de route et on m’a fait boire l’urine en question », raconte-t-il. Et de poursuivre : « j’ai été poignardé plusieurs fois avec un couteau dans le dos alors que j’étais menotté et la tête recouverte par un sac en plastique noir.»

Slimane Bouhafs évoque également des agressions physiques qu’il se refuse de décrire devant le tribunal « par respect aux avocates, ses deux filles et à toutes les femmes présentes dans la salle de l'audience ».

Il affirme avoir été acheminé par les voix irrégulières sans passer par les gardes frontières ou les postes frontaliers. Arrivé en Algérie, il est alors conduit directement aux locaux de la caserne Antar où il est interrogé pendant plusieurs jours d’affilés, sur sa religion notamment. Slimane Bouhafs est chrétien depuis plusieurs années. Sa conversion qui n’a pas été du goût de tous, lui a même valu « sa tête mise à prix par un imam à 500 000 Da et un emprisonnement de deux années, décidé par la justice algérienne entre 2016 et 2018 », affirme-t-il encore.

À la question s’il connaissait Ferhat Mehenni, le militant est catégorique. « Bouaziz je l'ai connu en prison, comment puis-je connaître Ferhat Mehenni ? Je n'ai rien dit de tel, ce sont eux qui le disent (les policiers qui l'ont interrogé, ndlr) », soutient-il. Et d’ajouter : « je n'accuse pas l'État algerien, mais il y a en son sein une faction qui n'en fait qu'a sa tête. Il y a forcément un lien entre mon kidnapping et le fait de me retrouver à Antar !»

« Cette supposée carte d'identité kabyle GPK (Gouvernement provisoire Kabyle en exil, ndlr), retrouvée dans mes affaires et datant de 2012, comment se fait-il qu’elle n’a pas été retrouvée en 2016 et voilà que le DRS (services secrets, ndlr) la retrouve en 2021 ?», lance-t-il au juge avec étonnement.

Aux tortures physiques qu’il a subies, s’ajoutent celles psychologiques qu’il n’omettra pas de mentionner. « Ils ont menacé ma famille. J’ai commencé à les insulter espérant qu'ils me tuent », affirme-t-il.

Revenant sur les conditions de son extradition de Tunisie, Slimane Bouhafs semble être certain que ceux qui l’ont kidnappé sont des « terroristes daechistes ». « Deux groupes m'ont escorté de la frontière tunisienne jusqu'à la caserne Antar où je suis resté pendant cinq jours avant de me confier à la police », explique-t-il. Sans transition, Slimane Bouhafs évoque une nouvelle fois le MAK et réitère « ne jamais avoir fait partie du mouvement de Ferhat Mehenni ».

« Si on me fait payer mon christianisme qu'on me dise !» s'interroge-t-il encore à l’adresse du juge qui lui rappelle que « tous les chrétiens ne sont pas persécutés ». « Si. Il ne fait pas bon d'être chrétien », rétorque Bouhafs.

C’est alors que le juge lui rappelle l'accusation portée à son encontre à savoir, « l'atteinte au prophète de l'islam ».

« J'ai du respect pour l'islam, les musulmans et leur prophète parce que mon père et ma mère sont musulmans », répond-il, toujours aussi convaincu qu’on s’en est pris à lui, à cause de sa religion.

Autre réaction qui a choqué l'assistante. Le juge n'a montré aucun intérêt aux déclarations de Slimane Bouhafs. Selon plusieurs témoins qui ont assisté au procès, le juge a failli s'en dormir à plusieurs reprises et ce, depuis minuit. Aucune enquête n'a été diligentée à la suite de son témoignage glaçant, ce que regrette Me Salah Dabouz dans un long écrit publié sur sa page Facebook. Comme si tout était tranché, y compris le verdict, avant même le début du procès.

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