Le débat télévisé entre les candidats à l’élection présidentielle du 12 décembre, que le pouvoir a voulu vendre au peuple algérien comme étant une avancée démocratique en terme de concurrence politique, n’a non seulement été boycotté par l’immense majorité des algériens, mais discrédité par les institutions spécialisées en la matière.
L’initiative Munathara, qui est une organisation leader dans ce domaine au Nord de l’Afrique et dans le Moyen Orient, estime que le débat organisé entre les cinq candidats à la mascarade du 12/12, ne répond pas aux normes de transparence. «L’initiative Munathara, la plus grande organisation arabe spécialisée dans l’organisation des débats et en sa qualité de promoteur des débats présidentiels organisés dernièrement en Tunisie, considère que les débats présidentiels prévus le vendredi 6 décembre en Algérie, ne répondent pas aux normes internationales relatives à la transparence et à l’indépendance vis-à-vis de l’autorité (ANIE, Ndlr)», écrit l’organisation dans un communiqué publié sur son site.
L’ANIE voulait tout contrôler
Un coup dur pour les promoteurs de ce pseudo «face-à-face» qui se vantent d’un rendez-vous historique et croient avoir réussi à tromper l’opinion publique. L’initiative Munathara ne s’arrête pas là, puisque qu’elle ira jusqu’à démasquer les dessous de ce «débat» et comment le pouvoir en Algérie, à travers l’Autorité des élections (ANIE) que préside Mohamed Charfi, un ancien ministre sous Bouteflika, a tout fait pour contrôler ce rendez-vous et lui tracer des limites. Munathara dit avoir «insisté à maintes reprises», notamment lors d’une réunion avec l’ANIE à Alger, sur «la nécessité du respect, lors des débats, d’un certain nombre de normes internationales, pour mener à bien la mission et permettre à l’électeur de choisir son candidat en toute liberté». Mais en vain. Puisque «l’ANIE voulait avoir l’exclusivité et jouir de tous les pouvoirs concernant les débats», fustige-t-elle. Non sans mentionner : «Or, l’autorité est chargée d’organiser l’élection, non pas le débat» !
Manque de transparence
Autre détail, les journalistes semblent avoir été choisis pour leur allégeance au régime en place. Car, Munathara rappelle que dans de nombreux pays, où il y a eu débats télévisés entre candidats, «ce sont les parties civiles parmi les organisations, les associations, les think thank et les organes médiatiques qui les organisaient». En Algérie, le black-out a voulu que le pouvoir agisse autrement. «L’Agence presse Algérie (APS), a annoncé lundi passé que le débat allait avoir lieu vendredi, ce qui rendait difficile l’opération de préparation», précise l’organisation qui pointe du doigt «un manque de transparence dans les normes adoptées pour le choix des modérateurs des débats, dans la nature des questions, outre l’absence de questions commentaires, ce qui empêche les journalistes de débattre avec la candidats».
Enfin, Munathara n’ignore pas le contexte dans lequel intervient ce «débat télévisé» entre les cinq candidats du régime, en l’occurrence Ali benflis, Abdelmadjid Tebboune, Azzedine Mihoubi, Abdelkader Bengrina et Abdelaziz Belaid. Un contexte qu’elle qualifie de «fragile» où la presse algérienne «se trouve ciblée, notamment après les dernières suspensions de journalistes». A signaler que l’initiative Munathara est un groupe civil indépendant créée en 2012 qui a à son compte 38 débats télévisés dans 6 pays du Moyen Orient et du Nord de l’Afrique. En 7 ans, 10 000 jeunes issus de 13 pays ont été formés dans les techniques de dialogue.
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